Sudeki

Quatre héros aux capacités distinctes, un monde médiéval/fantastique haut en couleur sur le point de basculer dans les Ténèbres, un système d’évolution des personnages et de la magie à la pelle… tiens, enfin un RPG « console » à se mettre sous la dent sur Xbox. Sudeki, c’est son nom, débarque en exclusivité sur la console de Microsoft après plus de deux ans de développement chez les anglais de Climax, qui signent d’ailleurs là leur premier jeu du genre. Et il faut bien avouer que, malgré quelques défauts de jeunesse, Sudeki se révèle assez prenant et apportera certainement un bon bol d’air frais aux amateurs du genre… en attendant Fable bien sûr !

Le bonheur tient parfois à peu de choses… C’est ce que l’on pourrait se dire après quelques heures de jeu dans l’univers de Sudeki. En effet, plutôt absent depuis le lancement de la Xbox le style RPG ne s’est décliné pour l’instant qu’en adaptations de jeux PC (Morrowind, Dark Project, KotOR, Deus Ex, etc). C’est donc avec joie que l’on découvre que les anglais de Climax se sont mis au travail afin de combler cette lacune. Pour se faire, et pour ne pas prendre trop de risques, ils ont clairement empruntés un maximum au style japonais. Mais plutôt que de nous servir un clone sans saveur, ils ont aussi eu la bonne idée d’inclure bon nombre d’éléments de leur cru. On se retrouve donc avec une sorte de RPG japonais sauce européenne, très orienté action, doté d’un background solide mais ultra-classique, et qui foisonnent de petites idées intéressantes, malheureusement pas assez développées. Mais n’oublions pas que c’est le tout premier jeu du genre pour Climax et que Final Fantasy ne s’est pas fait en un jour… Ceci étant dit, ne comparons pas l’incomparable et voyons voir de plus près ce que ce Sudeki nous propose.

– Classique mais efficace !

Créer un RPG lorsque l’on a quasiment que des jeux de courses à son actif semble être un pari osé. Climax franchit pourtant le pas sous la houlette de Microsoft Game et vient combler le vide sur Xbox en matière de RPG « console ». Peut-être pour contre balancer avec le parti pris graphique au niveau du design des personnages (qui ne fera pas l’unanimité, question de goûts), les développeurs ont déroulé une toile de fond à Sudeki on ne peut plus classique et enfantine. Cependant narrée, en français, avec grande classe et originalité lors de l’introduction du jeu. Au départ il n’y avait que la Lumière et un Dieu, nommé Tetsu, qui s’ennuyait tellement qu’il eût la bonne idée de se créer un frère… Malheureusement, le frère en question montra bien vite des prédispositions à occuper la place vacante de gros vilain. Le monde de Sudeki se sépara alors en deux avec d’un côté la Lumière et de l’autre les Ténèbres. Mais voilà, mille ans ont passé et les gentils qui vivent dans la grande cité d’Illumina en ont un peu marre de recevoir la visite des créatures du Mal. Pour se protéger, ils décident de construire quatre tours qui, à l’aide de cristaux géants, permettraient de générer un bouclier qui protègerait tout le continent.

Vous l’avez deviné, c’était pas trop dur non plus, il va falloir dans un premier temps se mettre en quête de ces cristaux et explorer le monde alentour. Pas de panique, pas la peine de courir partout en criant « Cristaaaaal, criiistaaal ! », Sudeki démarre plutôt lentement et vous place en début de partie dans la peau de Tal, un jeune guerrier de la garde royale. S’en suivra une longue cinématique réalisée (comme toutes les autres) avec le moteur du jeu plaçant les personnages et l’univers dans lequel vous allez évoluer. Il y a Ailish, princesse et magicienne peu vêtue aux cheveux bleus, qui possède la capacité de détecter les trésors cachés. Elco, le scientifique féru de flingues, équipé d’un jetpack et maîtrisant également la magie. Et enfin, Buki, une guerrière mi-humaine, mi-féline armée de griffes et elle aussi très peu vêtue… c’est qu’il fait très chaud dans le monde de Sudeki 😉 Au départ vous ne contrôlerez que Tal puis, au fur et à mesure que vous avancerez, ces autres personnages se joindront à vous pour former au final une solide équipe de quatre aventuriers. Le déroulement de l’histoire, sans atteindre des sommets, est d’ailleurs assez travaillé et Sudeki s’amuse souvent à vous faire contrôler un groupe de deux persos pour une quête donnée. Puis, une fois la quête effectuée, revient en arrière dans le temps pour vous faire vivre les évènements avec les deux autres persos.

Les dialogues sont plutôt sympathiques et contiennent pas mal d’humour. La traduction et les doublages (le jeu est intégralement en français) sont globalement de qualités, avec tout de même des passages bien mieux réussis que d’autres. A ce sujet, dans Sudeki, pas de grands discours comme dans Morrowind où il fallait se coltiner une heure de lecture (au moins) avant de commencer à jouer. A chaque PNJ (Personnage Non Joueur) interrogé, plusieurs réponses ou questions sont disponibles au choix (en général deux ou trois) et leurs réponses seront toujours les mêmes, sauf cas exceptionnels.

– Un Beat’em all/RPG !

Je n’ai pour l’instant parlé que de l’aspect RPG mais Climax a fait un choix plutôt original au niveau du système de combat, qui fait de Sudeki un jeu un peu à part. En effet, au lieu de proposer des combats au tour par tour comme dans la plupart des RPG, Sudeki propose des combats en temps réel. Concrètement, le jeu est séparé en deux phases : l’exploration et les combats. Les petits chemins tortueux et les villages sont synonymes d’exploration, alors que les aires ou salles plus vastes donneront lieu quasiment à chaque fois à des combats. Lors de ces phases, vous pourrez choisir d’incarner n’importe lequel des membres de votre équipe en les faisant défiler d’une simple pression sur Blanc ou Noir. Les autres persos sont alors en mode automatique et peuvent être paramétrés à tout moment de façon à éviter le combat, défendre ou attaquer. Pour les guerriers doués au corps à corps comme Tal et Buki, le jeu vous placera en vue à la troisième personne et les attaques se réaliseront à l’aide de combos dont l’efficacité est liée au timing, un peu comme dans Phantasy Star Online (A, A, X ou A, X, A, etc). Comme pour les phases d’exploration, le stick analogique droit permettra d’orienter la caméra et le gauche dirigera le personnage.

En ce qui concerne les personnages utilisant la magie comme Ailish et Elco, les phases de combats se dérouleront comme dans un FPS en vue à la première personne et, avouons-le, c’est particulièrement efficace et sympathique. Ainsi, pendant que Tal et Buki se charge de contenir les ennemis au corps à corps, Elco et Ailish placés en retrait balancent des sorts d’attaque et de guérison. Bien entendu les combats ne se dérouleront pas toujours de cette manière et il faudra souvent fouiller son inventaire et trouver d’autres techniques pour s’en sortir indemne. Pour cela, et pour ne pas couper l’action trop brutalement, Sudeki permet d’ouvrir pendant le combat un menu rapide avec Y. Le jeu ralentit alors à fond dans un style Matrix du plus bel effet et on a quelques secondes pour faire son choix entre potions et sortilèges avant de se ramasser un gros coup de masse. On peut également, grâce au bouton X, changer d’arme pendant le combat. Certaines ayant une cadence de tir très lente mais sont puissantes, d’autres proposant exactement l’inverse. Bref, c’est dynamique à souhait et on s’amuse vraiment durant ces phases, d’autant que les combats ne sont pas aléatoires et qu’on sait donc la majorité du temps à quoi s’attendre. Par contre, il faudra sans cesse garder un oeil sur les statistiques des autres membres du groupe car ils ne se soignent jamais de leur propre initiative ni ne lancent de magie.

– Une évolution (trop) calibrée…

Un des points à aborder quand on parle d’un jeu de rôles est bien entendu l’évolution des personnages, et de ce côté Sudeki fait le minimum syndical. Ne vous attendez donc pas à monter vos persos au niveau 150 et à disposer de centaines de sortilèges, le niveau maximum est limité à 30 et chaque personnage ne dispose que de six sortilèges (offensifs, défensifs, curatifs ou encore d’améliorations d’état) et deux Coups Divins. Ces derniers peuvent être considérés comme des invocations tant ils sont dévastateurs. On les obtient automatiquement à certains moments du jeu et pour pouvoir les lancer il faudra remplir une jauge spéciale. Les six sortilèges quand à eux ne sont pas donnés d’office et il faudra choisir de prendre celui-là plutôt qu’un autre au moment où le personnage monte d’un niveau. A cet instant, le jeu signale par une croix verte dans le menu qu’une amélioration est possible. Il y aura alors un ou deux points de statistiques à placer où bon vous semble.

Les quatre (et seules) caractéristiques des héros sont Santé, Puissance, Compétence et Essence. Passons la première. La deuxième (Puissance) permet d’augmenter la force de frappe avec les armes blanches. « Compétence » augmente la taille de la barre de magie (PC dans le jeu) et « Essence » augmente l’efficacité de tout ce qui est magique, que ce soit des sorts d’attaque, de défense ou de soin. Bref, pas de quoi sauter au plafond et pourtant, étrangement, la sauce prend… D’autant plus que les armes et armures ne sont pas en reste et, comme dans Diablo, il est possible d’aller chez un forgeron pour y ajouter des runes possédant certains pouvoirs. On peut ainsi, si l’arme ou l’armure dispose de slots prévus à cet effet, la transformer en lui ajoutant une fonction d’empoisonnement, de guérison, de récupération (de vie ou de magie). Mais aussi, et ce uniquement pour les armes, augmenter leurs statistiques en Force ou le pourcentage des Coups Critiques. Malheureusement, ces évolutions sont tout de même assez limitées. Bien évidemment il faudra engranger les Florins, la monnaie en vigueur dans Sudeki, afin de pouvoir acheter ce genre d’équipements relativement coûteux. Pour se procurer cet argent, il suffira de briser les milliers de caisses et tonneaux qui traînent un peu partout ou bien de revendre à un marchand les innombrables objets prévus à cet effet ramassés ici et là.

– Oui, mais…

Ce qui surprend dès les premières minutes de jeu dans Sudeki c’est cette qualité graphique globale qui fait fortement penser à certains screenshots de Fable. La gestion des ombres et de la lumière, l’intégration des personnages dans les décors, les petites routes de campagne, les bords de mer, les couchers de soleil, tout est très soigné graphiquement et vraiment féerique au niveau du choix des couleurs. L’animation des personnages n’est pas au top mais reste suffisamment travaillée pour qu’on ait pas l’impression de diriger un bout de bois. On note tout de même que certains décors ont une fâcheuse tendance à se ressembler, mais cela reste assez rare. Une réussite donc de ce côté puisqu’au niveau du dépaysement c’est gagné, le monde de Sudeki est riche de détails et de couleurs chatoyantes, c’est un vrai plaisir que de s’y promener…

Malheureusement, et c’est là que le bât blesse, Sudeki propose une aventure intense mais vraiment trop courte par rapport à la concurrence et sacrément linéaire. Les diverses quêtes annexes sont, tout comme la quête principale, d’une simplicité enfantine et seuls quelques Boss viendront de temps en temps rehausser le niveau de difficulté. La majorité des énigmes et petits puzzles qui jalonnent le jeu sont du même acabit et il faudrait n’avoir jamais joué à un seul jeu de rôles pour ne pas les résoudre instantanément. C’est vraiment dommage quand on voit tout le potentiel de ce jeu qui aurait facilement pu être un petit bijou si les développeurs avaient pris le temps d’ajouter plus de quêtes annexes, un mode multijoueur et laissés plus de liberté au niveau de l’évolution des personnages. Bref, un coup d’essai globalement réussi pour Climax puisque Sudeki s’avère très agréable à jouer, mais qui nous laisse sérieusement sur notre faim tant il se termine vite. Trois ou quatre après-midi de bonheur sur Xbox valent-elles presque 60€, tout dépend du type de joueur que vous êtes et des espoirs que vous nourrissiez avec ce titre. Sudeki n’est au final qu’un petit Action/RPG très joli et prenant, mais plutôt orienté grand public ou novices du genre.

Technique

Féeriques et envoûtants, les décors sont très jolis et jamais ne dénotent, sans pour autant faire fumer le processeur de la Xbox. Les diverses animations sont globalement réussies, quoiqu’un peu rigides parfois.
16/20

Audio

Les musiques restent très discrètes et ne dégagent pas grand chose de particulier. La traduction intégrale en français est louable et de bonne facture mais on regrettera que les doublages soient si inégaux.
12/20

Jouabilité

Le mélange de genre entre Beat’em all et RPG fait des miracles. Les combats sont extrêmement dynamiques, parfois assez violents et ne posent pas de problèmes particuliers à l’apprentissage.
17/20

Intérêt

Les habitués au genre n’en feront qu’une bouchée mais malgré tout on prend beaucoup de plaisir à découvrir l’histoire et à faire évoluer le groupe de héros. Si vous aimez les longues quêtes complexes, passez votre chemin…
12/20

NOTE GLOBALE
Dommage. Avec plus de quêtes annexes et un mode multijoueur Sudeki aurait sûrement été un titre incontournable de la Xbox. Mais avec sa durée de vie limitée et ses énigmes ultra-simplistes le titre de Climax manque clairement de profondeur pour satisfaire pleinement les fans du genre. Malgré cela il est très plaisant d’évoluer dans cet univers féerique, les combats sont vraiment prenants et le déroulement de l’histoire est suffisamment bien conçu pour nous pousser à aller jusqu’au bout le plus vite possible, preuve d’une réalisation soignée et d’un certain charisme. Sudeki côtoie donc, pour le meilleur et pour le pire, bonnes idées et grosses erreurs. Des erreurs qui ne nuisent en rien à la jouabilité et à l’aventure mais qui auront pour effet de décevoir ceux qui plaçaient de trop grands espoirs dans ce titre. Sudeki est un petit Action/RPG rythmé, sympathique et rafraîchissant, avant tout dédié aux débutants ou aux inconditionnels du genre, il est vrai particulièrement en manque de jeux du genre sur Xbox. Bref, une bonne entrée en matière en attendant Fable qui, on l’espère, fera office de plat de résistance et dessert…
14/20

+ Décors riches et féeriques
+ Combats dynamiques
+ Sorts impressionnants
+ Aventure rythmée – Durée de vie
– Evolution des persos limitée
– Enigmes simplistes
– Très linéaire